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  • Discours de Noam Chomsky, Bonn, Allemagne, le 17 juin 2013

    Noam Chomsky 2013.jpgDiscours de Noam Chomsky au DW Global Media Forum, Bonn, Allemagne, le 17 juin 2013

    Je souhaite commenter des thèmes qui, je le pense, devraient figurer régulièrement à la une des journaux mais qui n’y sont pas – et qui dans beaucoup de cas cruciaux sont à peine évoqués du tout, ou alors sont présentés de façons qui me semblent propres à leurrer les gens, parce qu’ils sont expliqués, presque par réflexe, dans les termes des doctrines des puissants.

    Dans ces commentaires je vais me concentrer sur les USA pour plusieurs raisons: un, c’est le pays le plus important en termes de sa puissance et de son influence. Deux, c’est le plus avancé – pas dans son caractère intrinsèque, mais dans le sens où du fait de sa puissance, d’autres sociétés tendent à se mouvoir dans cette direction. La troisième raison, c’est juste que je les connais un peu mieux. Mais je pense que ce que je dis a une portée beaucoup plus générale – du moins autant que je sache, évidemment il y a quelques variantes. Je vais donc me concentrer sur les tendances dans la société états-unienne et ce qu’elles annoncent pour le monde, vue la puissance états-unienne.

    La puissance des USA diminue, comme elle l’a fait depuis son apogée en 1945, mais elle reste incomparable. Et elle est dangereuse. La campagne globale et remarquable d’Obama contre le terrorisme et la réaction limitée et pathétique de l’Occident en est un exemple choquant. Et c’est une campagne de terrorisme international – de loin la plus extrême au monde. Ceux qui conservent encore des doutes devraient lire le rapport publié par l’Université de Stanford et l’Université de New York, et en fait je reviendrai à des exemples encore plus sérieux que le terrorisme international.

    Selon la doctrine reçue, nous vivons dans des démocraties capitalistes, qui sont le meilleur système possible, malgré quelques imperfections. Il y a eu un débat intéressant au fil des ans sur la relation entre le capitalisme et la démocratie, par exemple, sont-ils même compatibles? Je ne vais pas poursuivre là-dessus parce que je souhaite parler d’un système différent – ce que nous pourrions appeler la "démocratie capitaliste qui existe vraiment"RECD en abrégé, prononcé "wrecked" par accident (jeu de mots: "really existing capitalist democracy", RECD, ou "wrecked", qui veut dire "brisée", "démolie", "naufragée", ndt). Pour commencer, comment comparer RECD à la démocratie? Et bien cela dépend de ce que nous entendons par "démocratie". Il y a plusieurs versions de cela. D’une part, il y a une sorte de version retenue. C’est de la rhétorique emphatique du même genre que celle d’Obama, des discours patriotiques, ce qu’apprennent les enfants à l’école, &c. Dans la version US, c’est le gouvernement "du peuple, pour et avec le peuple". Et c’est plutôt facile de comparer cela à RECD.

    Aux USA, l’un des sujets principaux de la science politique académique est l’étude des attitudes et des politiques et de leur corrélation. L’étude des attitudes est relativement facile aux USA: une société lourdement sondée, des sondages plutôt sérieux et précis, et des politiques que vous pouvez voir, et comparer. Et les résultats sont intéressants. Dans le travail qui représente essentiellement l’étalon-or du domaine, il a été conclu qu’à peu près 70% de la population – les 70% du bas de l’échelle des richesses/revenus – ils n’ont aucune influence du tout sur la politique. Ils sont véritablement laissés pour compte. Comme vous montez dans l’échelle des richesses/revenus, vous obtenez un peu plus d’influence sur la politique. Quand vous arrivez en haut, ce qui représente peut-être le dixième d’un pour cent, les gens obtiennent à peu près tout ce qu’ils veulent, c’est-à-dire qu’ils décident de la politique. Donc le terme correct pour çà n’est pas la démocratie; c’est la ploutocratie.

    Des enquêtes de ce genre s’avèrent être du matériel dangereux parce qu’elles peuvent en dire trop aux gens sur la nature de la société dans laquelle nous vivons. Et donc malheureusement, le Congrès a interdit leur financement, et nous n’avons donc pas à nous en soucier à l’avenir.

    Ces caractéristiques de RECD se révèlent tout le temps. Le thème central aux USA est donc celui des emplois. Les sondages le démontrent très clairement. Pour les très riches et les institutions financières, le thème principal, c’est le déficit. Et qu’en est-il de la politique? Il y a à présent une séquestration aux USA, une grande réduction des financements. Est-ce à cause des emplois ou du déficit? Et bien, du déficit.

    En Europe, incidemment, c’est bien pire – tant et si bien que même le Wall Street Journal était horrifié par la disparition de la démocratie en Europe. Ils avaient un article il y a une quinzaine de jours qui concluait que "les Français, les Espagnols, les Irlandais, les Néerlandais, les Portugais, les Grecs, les Slovènes, les Slovaques et les Chypriotes ont voté contre le modèle économique de la monnaie unique à des degrés différents depuis que la crise a commencé il y a trois ans. Pourtant les politiques économiques ont peu changé en réponse à chaque défaite électorale subie à la suite de l’autre. La gauche a remplacé la droite; la droite a sorti la gauche. Même le centre-droite a dérouillé les communistes (à Chypre) – mais les politiques économiques sont essentiellement restées les mêmes: les gouvernements vont continuer à couper dans les dépenses et augmenter les impôts." Ce que pensent les gens importe peu et "les gouvernements nationaux doivent suivre les directives macro-économiques édictées par la Commission Européenne". Les élections sont presque insignifiantes, presque comme dans les pays du Tiers-Monde qui sont dirigés par les institutions financières internationales. C’est ce qu’a décidé de devenir l’Europe. Elle n’y est pas obligée.

    Revenant aux USA, où la situation n’est pas tout à fait aussi mauvaise, il y a la même disparité entre l’opinion publique et la politique sur une gamme très large de sujets. Prenez par exemple le sujet du salaire minimum. Une opinion est que le salaire minimum devrait être indexé sur le coût de la vie et assez haut pour empêcher de tomber sous le seuil de pauvreté. 80% du public soutient cela et 40% des riches. Quel est le salaire minimum? En train de descendre, bien en-deçà de ces niveaux. C’est la même chose avec les lois qui facilitent l’action des syndicats; fortement soutenues par le public; recevant l’opposition des très riches – et disparaissant. C’est aussi vrai pour le système de santé national. Les USA, comme vous le savez sans doute, ont un système de santé qui est un scandale international, ils en sont au double du coût par personne en comparaison aux autres pays de l’OCDE et avec des résultats relativement pauvres. Le seul système de santé privatisé, et grosso modo dérégulé. Le public ne l’aime pas. Ils ont réclamé un système national intégré, des options publiques, pendant des années, mais les institutions financières pensent qu’il est très bien, alors il reste: stagnation. En fait, si les USA avaient un système de santé comme d’autres pays développés comparables il n’y aurait pas de déficit. Le fameux déficit serait effacé, ce qui ne compte pas tant que çà de toute façon.

    L’un des cas les plus intéressants concerne les impôts. Pendant 35 ans il y a eu des sondages sur ‘que pensez-vous que devraient être les impôts?’ De larges majorités ont soutenu que les corporations et les riches devraient payer plus d’impôts. Ils se sont constamment réduits pendant cette période.

    Encore et encore, la politique est toujours l’inverse presque exact de l’opinion publique, ce qui est une propriété typique de RECD.

    Dans le passé, les USA ont parfois, un peu sardoniquement, été décrits comme un état à un parti unique: le parti des affaires avec deux factions appelées Démocrates et Républicains. Ceci n’est plus vrai. C’est toujours un pays à parti unique, le parti des affaires. Mais il n’a qu’une seule faction. C’est la faction des Républicains modérés, qui s’appellent aujourd’hui Démocrates. Il n’y a presque pas de Républicains modérés dans ce qui s’appelle le Parti Républicain et presque pas de Démocrates libéraux (note: dans le monde anglophone, les libéraux sont de gauche, ndt) dans ce qui s’appelle le Parti Démocrate [sic]. C’est en gros ce que seraient des Républicains modérés et par analogie, Richard Nixon serait loin à gauche de l’éventail politique aujourd’hui. Eisenhower serait hors de l’orbite terrestre.

    Il y a toujours quelque chose qui s’appelle le Parti Républicain, mais il a depuis longtemps abandonné toute prétention à être un parti parlementaire normal. Il est au service, au doigt et à l’œil, des très riches et du secteur corporatiste et a un catéchisme que tout le monde doit chanter à l’unisson, un peu comme l’ancien Parti Communiste. Le fameux commentateur conservateur, l’un des plus respectés – Norman Ornstein – décrit le Parti Républicain d’aujourd’hui comme, en ses termes, "une insurrection radicale – idéologiquement extrême, dédaigneuse des faits et du compromis, rejetant son opposition politique" – une sérieuse menace à la société, comme il le souligne.

    Bref, RECD est très éloignée de la rhétorique emphatique à propos de la démocratie. Mais il existe une autre version de la démocratie. En réalité il s’agit de la doctrine de base de la théorie démocratique libérale contemporaine. Je vais donc vous donner des citations illustratives de la part de personnages éminents – incidemment pas des personnages de la droite. Ce sont tous des libéraux à la Woodrow Wilson-FDR-Kenndy, des figures consensuelles, en fait. Donc selon cette version de la démocratie, "le public est fait d’étrangers ignorants et importuns. Ils doivent être mis à leur place. Les décisions doivent être entre les mains d’une minorité intelligente d’hommes responsables, qui doivent être protégés du piétinement et de la clameur du troupeau abruti". Le troupeau a une fonction, il se trouve. Il est attendu d’eux qu’ils portent leur poids une fois toutes les quelques années, à un choix entre les hommes responsables. Mais à part cela, leur fonction est d’être des "spectateurs, pas des participants à l’action" – et c’est pour leur propre bien. Parce que comme l’avait souligné le fondateur de la science politique progressiste, nous ne devrions pas succomber à des "dogmatismes démocratiques sur les gens étant les meilleurs juges de leurs propres intérêts". Ils ne le sont pas. Nous sommes les meilleurs juges, et il serait donc irresponsable de les laisser prendre des décisions tout comme il serait irresponsable de laisser un enfant de trois ans courir en pleine rue. Les attitudes et les opinions ont donc besoin d’être contrôlées pour le bénéfice de ceux que vous contrôlez. Il est nécessaire de "régenter leurs esprits". Il est aussi nécessaire de discipliner les institutions responsables de "l’endoctrinement de la jeunesse." Toutes des citations, au fait. Et si nous pouvons accomplir cela, nous pourrions revenir aux bons vieux jours où "Truman avait été capable de gouverner le pays avec la collaboration d’un nombre assez réduit d’avocats et de banquiers de Wall Street." Tout ceci provient d’icônes de l’establishment libéral, les théoriciens en pointe de la démocratie progressiste. Certains d’entre vous reconnaîtront peut-être certaines des citations.

    Les racines de ces attitudes remontent plutôt loin. Elles remontent aux premiers soubresauts de la démocratie moderne. Les premiers survinrent en Angleterre au 17è siècle. Comme vous savez, plus tard aux USA. Et elles persistent de façon fondamentale. La première révolution démocratique fut l’Angleterre des années 1640. Il y a eu une guerre civile entre le roi et le parlement. Mais la noblesse, les gens qui s’appelaient eux-mêmes "les hommes de meilleure qualité", étaient horrifiés par les forces populaires en plein essor qui commençaient à faire leur apparition dans l’arène publique. Ils ne voulaient soutenir ni le roi ni le parlement. Citez leurs pamphlets, ils ne voulaient pas être dirigés par des "chevaliers et des gentilshommes, qui ne font que nous oppresser, mais nous voulons être gouvernés par des compatriotes tels que nous-mêmes, qui connaissons les maux du peuple". Voilà une chose assez terrifiante à considérer. Maintenant, la populace a été une chose assez terrifiante à voir depuis. En réalité elle l’était déjà depuis longtemps auparavant. Elle l’est restée un siècle après la révolution démocratique britannique. Les fondateurs de la la république états-unienne avaient à peu près la même opinion de la populace. Ils ont donc déterminé que "le pouvoir doit être entre les mains de la richesse de la nation, le lot d’hommes plus responsables. Ceux qui ont de la sympathie pour les propriétaires et pour leurs droits", et bien sûr pour les propriétaires d’esclaves à l’époque. En général, les hommes qui comprennent qu’une tâche fondamentale du gouvernement est "de protéger la minorité opulente de la majorité". Ce sont des citations de James Madison, l’encadrant principal – ceci était dans la Convention Constitutionnelle, qui est beaucoup plus révélatrice que les Papiers Fédéralistes que lisent les gens. Les Papiers Fédéralistes étaient tout simplement un effort de propagande pour tenter de faire que le public soit d’accord avec le système. Mais les débats dans la Convention Constitutionnelle sont beaucoup plus révélateurs. Et en fait le système constitutionnel a été créé sur ces bases. Je n’ai pas le temps d’entrer dans le détail, mais il adhérait globalement au principe qui a été énoncé simplement par John Jay, le président du Congrès Continental, puis tout premier Premier Président de la Cour Suprême, et comme il le disait, "ceux à qui appartiennent le pays devraient le gouverner". Ceci est la doctrine centrale de RECD jusqu’à aujourd’hui.

    Il y a eu beaucoup de combats populaires depuis – et ils ont gagné beaucoup de victoires. Les maîtres, par contre, ne relâchent rien. Le plus il y a de liberté qui est gagnée, plus intenses deviennent les efforts pour réorienter la société vers une trajectoire plus appropriée. Et la théorie démocratique progressiste du 20è siècle que je viens d’échantillonner n’est pas très différente de la RECD qui a été accomplie, hormis pour la question de: quels hommes responsables devraient régner? Cela devrait-il être les banquiers ou les élites intellectuelles? Ou à ce propos cela devrait-il être le Comité Central dans une version différente de doctrines similaires?

    Et bien, un autre aspect important de RECD est que le public doit être maintenu dans l’ignorance de ce qui est en train de lui arriver. Le "troupeau" doit rester "abruti". Les raisons en ont été expliquées de façon lucide par le professeur en science des gouvernements de Harvard – c’est le titre officiel – une autre figure libérale respectée, Samuel Huntington. Comme il l’a souligné, "le pouvoir reste fort tant qu’il reste dans l’ombre. Exposé à la lumière, il commence à s’évaporer". Bradley Manning est face au reste de sa vie en prison pour ne pas avoir compris ce principe scientifique. Et maintenant Edward Snowden aussi. Et cela marche plutôt bien. Si vous regardez les sondages, ils révèlent combien cela marche bien. Donc par exemple, des sondages récents révèlent de façon assez constante que les Républicains sont préférés aux Démocrates sur la plupart des sujets et surtout sur les sujets où le public est opposé aux politiques des Républicains et favorable aux politiques des Démocrates. Un exemple frappant de ceci est que les majorités disent qu’ils préfèrent les Républicains sur la politique fiscale, alors que les mêmes majorités s’opposent à ces politiques. Ceci est constant dans tout le spectre politique. C’est même vrai de la droite extrême, du genre Tea Party. Ceci s’accompagne d’un niveau étourdissant de mépris envers le gouvernement. Les opinions favorables sur le Congrès se comptent littéralement dans les unités. Pareil pour le reste du gouvernement. Tout cela décline rapidement.

    De tels résultats, qui sont assez constants, illustrent une démoralisation du public d’un genre inhabituel, bien qu’il y ait des exemples – la République de Weimar finissante vient à l’esprit. La tâche de s’assurer que la populace reste attelée à sa fonction comme spectatrice abrutie prend beaucoup de formes. La forme la plus simple est simplement de restreindre l’accès au système politique. L’Iran vient d’avoir des élections, comme vous le savez. Et elles ont été critiquées avec justesse du fait que même pour y participer, vous deviez être avalisé(e) par le conseil clérical des gardiens. Aux USA, Vous n’avez pas besoin d’être avalisé(e) par des religieux, mais vous avez plutôt besoin d’être avalisé(e) par des concentrations de capitaux privés. Si vous ne passez pas leur filtre, vous n’entrez pas dans le système politique – à de très rares exceptions près.

    Il y a beaucoup de mécanismes, trop rabattus à passer en revue, mais cela ne suffit pas non plus. Il y a des institutions majeures qui sont spécifiquement vouées à miner l’authentique démocratie. L’une d’entre elles s’appelle l’industrie des relations publiques. Une énorme industrie, elle a en fait été développée sur le principe qu’il est nécessaire de régenter les esprits humains, un peu comme une armée discipline ses soldats – je citais en fait l’une de ses éminentes figures, plus tôt.

    Le rôle de l’industrie des relations publiques est explicitement de miner la version de l’écolier de la démocratie. Ce que vous apprenez à l’école, c’est que les démocraties reposent sur des électeurs renseignés faisant des choix rationnels. Tout ce que vous avez à faire est de jeter un œil à une campagne gérée par l’industrie des relations publiques pour voir que l’objectif y est de créer des électeurs non-renseignés qui feront des choix irrationnels. Pour l’industrie des relations publiques il s’agit d’une transition très facile depuis leur fonction originelle. Leur fonction originelle concerne la publicité commerciale. La publicité commerciale est conçue pour miner les marchés. Si vous avez pris un cours d’économie vous avez appris que les marchés reposent sur des consommateurs renseignés faisant des choix rationnels. Si vous allumez la TV, vous voyez que les pubs sont conçues pour créer des consommateurs irrationnels et non-renseignés faisant des choix irraisonnés. Tout l’objectif est de miner les marchés dans un sens technique.

    Il s’avère qu’ils en sont bien conscients. Alors par exemple, après l’élection d’Obama en 2008, quelques deux mois après l’industrie de la publicité a eu sa conférence annuelle. Chaque année ils accordent un prix à la meilleure campagne de marketing de l’année. Cette année-là ils l’ont accordé à Obama. Il a battu Apple Inc., a fait un encore meilleur boulot pour tromper le public – ou c’est ce qu’ont fait ses agents de relations publiques. Si vous voulez en entendre un peu, allumez la TV aujourd’hui et écoutez la rhétorique emphatique du sommet du G-8 à Belfast. C’est la norme.

    Il y a eu un commentaire intéressant là-dessus dans la presse des affaires, principalement le Financial Times de Londres, qui avait un long article, interviewant des cadres supérieurs sur ce qu’ils pensaient des élections. Et ils étaient plutôt euphoriques à ce sujet. Ils ont dit que cela leur fournissait un nouveau modèle pour tromper le public. Le modèle Obama pourrait remplacer le modèle Reagan, qui a bien fonctionné pendant quelque temps.

    Nous tournant vers l’économie, le cœur de l’économie aujourd’hui ce sont les institutions financières. Elles se sont amplement agrandies depuis les années 1970, en parallèle avec un autre développement – le déplacement accéléré de la production à l’étranger. Il y a aussi eu des changements essentiels dans le caractère des institutions financières.

    Si vous remontez aux années 1960, les banques étaient les banques. SI vous aviez de l’argent, vous le placiez à la banque pour le prêter à quelqu’un pour acheter une maison ou démarrer une entreprise, ou autre. Il s’agit désormais d’un aspect très marginal des institutions financières aujourd’hui. Elles sont surtout dévolues à des manipulations compliquées et exotiques avec les marchés. Et elles sont énormes. Aux USA, les institutions financières, surtout les grandes banques, détenaient 40% des bénéfices du secteur corporatiste en 2007. C’était à la veille de la crise financière, de laquelle ils étaient grandement responsables. Après la crise, nombre d’économistes professionnels – le lauréat du prix Nobel Robert Solow, Benjamin Friedman de Harvard – ont écrit des articles où ils ont souligné que les économistes n’ont pas beaucoup étudié l’impact des institutions financières sur l’économie. Ce qui est plutôt remarquable, étant donné son étendue. Mais, après la crise ils ont regardé et ils ont tous les deux conclu qu’il est probable que l’impact des institutions financières sur l’économie soit négatif. En fait il y en a qui s’expriment plus bruyamment. Le correspondant financier le plus respecté du monde anglophone est Martin Wolf du Financial Times. Il écrit que le "secteur financier hors de contrôle est en train de dévorer l’économie de marché moderne de l’intérieur, tout comme la larve de la guêpe-araignée mange son hôte de l’intérieur, dans lequel elle a été pondue". Par "économie de marché", il entend l’économie productiviste.

    Il y a une parution récente du grand hebdomadaire des affaires, Bloomberg Business Week, qui a rapporté une étude du FMI ayant trouvé que les plus grandes banques ne font aucun bénéfice. Ce qu’elles gagnent, selon l’analyse du FMI, trouve sa source dans la politique d’assurance du gouvernement, la soit disant politique "trop gros pour couler" ("too big to fail", ndt). Il y a un sauvetage largement publicisé, mais c’est la moindre part. Il y a toute une série d’autres mécanismes par lesquels la politique d’assurance du gouvernement aide les grandes banques: des crédits à faible taux et beaucoup d’autres choses. Et selon le FMI au moins, c’est là le total de leurs bénéfices. Les éditeurs du journal disent que ceci est crucial pour comprendre pourquoi les grandes banques représentent une si grande menace à l’économie mondiale – et à la population du pays, bien sûr.

    Après que la crise ait survenu, il y a eu la première attention sérieuse portée par des économistes professionnels à ce qui s’appelle le risque systémique. Ils savaient que ça existait mais ce n’était pas vraiment un domaine d’investigation. Le ‘risque systémique’ veut dire que si une transaction échoue, l’ensemble du système est en mesure de s’effondrer. C’est ce qui s’appelle une externalité en théorie économique. C’est une note en bas de page. Et c’est l’une des failles fondamentales des systèmes de marché, une faille inhérente et bien connue, ce sont les externalités. Toute transaction a un impact sur les autres qui ne sont tout simplement pas prises en compte dans une transaction sur le marché. Le risque systémique en est un gros. Et il y a des illustrations beaucoup plus sérieuses que cela. J’y reviendrai.

    Et pour l’économie productiviste de RECD? Il y a un mantra ici aussi. Le mantra est basé sur l’initiative entrepreneuriale et le choix du consommateur dans un marché libre. Il y a des accords établis qui sont nommés accords de libre échange, qui reposent sur le mantra. Tout cela, c’est de la mythologie.

    La réalité est qu’il y a une intervention massive des états dans l’économie productiviste et que les accords de libre échange sont tout sauf des accords de libre échange. Ceci devrait être évident. Juste pour prendre un exemple: la révolution de la technologie de l’information (IT), qui propulse l’économie, qui a été basée sur des décennies de travail dans ce qui est effectivement le secteur public – un travail dur, coûteux, créatif principalement dans le secteur public, aucun choix des consommateurs du tout, il y a eu des initiatives entrepreneuriales mais grandement limitées à l’obtention de bourses gouvernementales ou de perfusions ou de subventions. Sauf pour quelques économistes, c’est sous-estimé mais un facteur très important des bénéfices corporatistes. Si vous ne parvenez pas à vendre quelque chose, donnez-le au gouvernement. Ils vont l’acheter.

    Après une longue période – des décennies, en fait – de travail acharné et créatif, la recherche et le développement de départ, les résultats sont transmis à l’entrepreneuriat privé pour la commercialisation et le profit. Voilà Steve Jobs et Bill Gates &c. Ce n’est pas aussi simple évidemment. Mais c’est un élément central du décor. Le système remonte loin aux débuts des économies industrielles, mais il est vrai de façon dramatique depuis la Seconde Guerre Mondiale que ceci devrait être au cœur de l’étude de l’économie productiviste.

    Un autre aspect central de RECD est la concentration du capital. Au cours des seules 20 dernières années aux USA, la part de bénéfices des 200 plus grosses entreprises a considérablement augmenté, sensiblement par l’impact de l’Internet, apparemment. Ces tendances vers l’oligopole minent aussi le mantra, bien sûr. Des thèmes intéressants mais que je ne vais pas explorer davantage.

    À la place, je souhaite me tourner vers une autre question. Quelles sont les perspectives d’avenir sous le régime de RECD? Il y a une réponse. Elles sont plutôt sombres. Ce n’est pas un secret qu’il y a nombre d’ombres menaçantes qui hantent chaque thème que nous abordons et il y en a deux qui sont particulièrement menaçantes, je vais donc les garder, bien qu’il y en ait d’autres. L’une est la catastrophe environnementale. L’autre est la guerre nucléaire. Les deux menacent bien entendu les perspectives d’une survie décente et pas dans un avenir lointain.

    Je ne dirai pas grand-chose sur la première, la catastrophe environnementale. Cela devrait être évident. L’importance du danger devrait certainement être évidente à quiconque ayant les yeux ouverts, quiconque est éduqué, en particulier ceux qui lisent les parutions scientifiques. Chaque numéro d’un journal technique contient presque des avertissements plus alarmants que le précédent.

    Il y a des réactions variables à ceci à travers le monde. Il y a ceux qui cherchent à agir de manière décisive pour éviter une catastrophe possible. À l’autre extrême, des efforts majeurs sont en cours pour accélérer le danger. En tête de l’effort pour intensifier le danger probable est le pays le plus riche et le plus puissant de l’histoire mondiale, doté d’avantages incomparables et l’exemple le plus pro-éminent de RECD – celui vers lequel les autres aspirent.

    En tête des efforts pour préserver les conditions dans lesquelles nos descendants peuvent avoir une vie décente, sont les soit disant sociétés "primitives": les Premières Nations au Canada, les sociétés aborigènes en Australie, les sociétés tribales et d’autres comme elles. Les nations qui ont en leur sein de larges et puissantes populations indigènes sont bien en avance dans l’effort pour "défendre la Terre". C’est leur phrase. Les pays qui ont poussé les populations indigènes à l’extinction ou à l’extrême marginalisation courent avec enthousiasme vers la destruction. Ceci est l’un des éléments majeurs de l’histoire contemporaine. L’une de ces choses qui devraient être en première page des journaux. Prenez donc l’Équateur, qui a une grande population indigène. Il recherche de l’aide de la part des pays riches pour l’aider à conserver ses vastes réserves d’hydrocarbures sous terre, ce qui est là où elles ont à être. Et pendant ce temps-là, les USA et le Canada sont en train de chercher à brûler chaque goutte disponible de combustible fossile, y compris la sorte la plus dangereuse – les sables bitumineux canadiens – et de le faire aussi vite et complètement que possible – sans le moindre regard de côté pour voir à quoi le monde pourrait ressembler après cet extravagant engagement à l’auto-destruction. En fait, chaque exemplaire des journaux quotidiens suffit à illustrer cette insanité. Et insanité est le mot approprié pour la chose. C’est exactement l’inverse de ce que la raison demanderait, à moins que ce ne soit le raisonnement bancal de RECD.

    Et bien, il y a eu des campagnes massives des corporations pour implanter et sauvegarder l’insanité. Mais malgré elles, il y a toujours un réel problème dans la société états-unienne. Le public est toujours trop soumis au raisonnement scientifique. L’une des nombreuses divergences entre la politique et l’opinion est que le public états-unien est proche de la norme globale dans sa préoccupation pour l’environnement et dans l’appel aux actions pour prévenir la catastrophe et là c’est d’un niveau assez haut. Pendant ce temps, la politique bi-partisane se dédie à ‘provoquer l’événement’, selon une phrase qui a rendu George W. Bush célèbre dans l’affaire de l’Irak. Heureusement, le secteur corporatiste arrive à la rescousse pour s’occuper de ce problème. Il y a une organisation financée par ce secteur – l’American Legislative Exchange Council (ALEC – Conseil US des Échanges Législatifs, ndt). Il conçoit la législation pour les états de l’Union. Pas besoin de commenter le genre de législation. Ils ont beaucoup de poids et d’argent derrière eux. Les programmes tendent donc à être mis en place. En ce moment ils sont en train d’essayer d’instituer un nouveau programme afin d’essayer d’outrepasser le raisonnement excessif du public. C’est un programme d’instructions pour le K-12 (classes de la maternelle à la fin du secondaire dans les écoles). Sa promotion dit que l’idée est d’améliorer les facultés de discernement – j’y serais à coup sûr favorable – par un enseignement équilibré. ‘Enseignement équilibré’ veut dire que si une classe de 5è apprenait quelque chose à propos de ce qui arrive au climat, il faudrait qu’ils soient présentés avec du matériel sur le déni du changement climatique afin qu’ils aient un enseignement équilibré et puissent développer leurs facultés de discernement. Peut-être ceci aidera-t-il à dépasser l’échec des énormes campagnes corporatistes de propagande à rendre la population ignorante et suffisamment irrationnelle pour préserver les bénéfices à court terme des riches. C’est défini comme l’objectif et plusieurs états l’ont déjà accepté.

    Et bien, cela vaut le coup de s’en souvenir, sans s’y attarder que ce sont des propriétés institutionnelles profondément installées de RECD. Elles ne sont pas faciles à déraciner. Tout ceci est à part de la nécessité institutionnelle de maximiser le bénéfice à court terme tout en ignorant une externalité qui est beaucoup plus sérieuse que le risque systémique lui-même. Pour le risque systémique, l’échec du marché – les coupables – peuvent courir vers l’état nourricier puissant qu’ils parrainent en faisant la manche et ils seront secourus, comme nous venons encore de le voir et le verrons à l’avenir. Dans le cas de la destruction de l’environnement, les conditions pour une existence décente, il n’y a pas d’ange gardien aux alentours – personne vers qui courir en faisant la manche. Pour cette seule raison, les perspectives de survie décente sous RECD sont assez glauques.

    Tournons-nous vers une autre ombre: la guerre nucléaire. C’est une menace qui est avec nous depuis 70 ans. Elle est toujours présente. De certaines façons elle augmente. L’une des raisons à cela est que sous RECD, les droits et besoins de la population en général sont un sujet d’importance mineure. Ceci s’étend à la sécurité. Il y a un autre mantra qui prévaut, particulièrement dans les professions académiques, affirmant que les gouvernements cherchent à protéger la sécurité nationale. Quiconque a étudié la théorie des relations internationales l’a déjà entendu. C’est pour la plus grande part de la mythologie. Les gouvernements cherchent à accroître le pouvoir et la domination et à en faire bénéficier leurs principaux membres constitutifs domestiques – aux USA, essentiellement le secteur corporatiste. La conséquence en est que la sécurité n’a pas une haute priorité. Nous le voyons tout le temps. En ce moment-même en fait. Prenez disons l’opération d’Obama pour assassiner Oussama ben Laden, suspect principal pour les attaques du 11 septembre. Obama a livré un discours important sur la sécurité nationale ce 23 mai dernier. Il a été largement commenté. Il y avait un paragraphe essentiel qui a été ignoré dans ces commentaires. Obama louait l’opération, y prenait de la fierté – une opération qui incidemment est un pas de plus vers le démantèlement des fondations de la loi anglo-saxonne, jusqu’à la Magna Carta, nommément la présomption d’innocence. Mais c’est maintenant si familier, qu’il ne vaut même pas la peine d’en parler. Mais il y a davantage. Obama a bien loué l’opération mais il a ajouté qu’elle ne "pouvait pas être la norme". La raison pour cela est que "les risques étaient immenses". Les SEALs de la Navy qui ont mené l’assassinat auraient pu être enferrés dans une fusillade prolongée, mais même si par chance cela ne s’est pas produit, "le coût à notre relation avec le Pakistan – et le retour d’opinion du public pakistanais sur l’empiètement de leur territoire", l’agression en d’autres termes, "était si grave que c’est seulement maintenant que nous sommes en train de reconstruire ce partenariat important".

    C’est plus que cela. Ajoutons un ou deux détails. Les SEALs avaient comme ordre de se battre s’ils étaient appréhendés. Ils n’auraient pas été laissés à leur sort s’ils avaient été, selon les mots d’Obama, "enferrés dans une fusillade prolongée". Toute la force militaire US aurait été employée pour les extraire. Le Pakistan a une armée puissante. Elle est bien entraînée, hautement protectrice de la souveraineté nationale. Bien entendu, elle dispose d’armes nucléaires. Et les plus éminents spécialistes pakistanais en politique nucléaire et sujets affiliés sont très préoccupés de l’exposition du système d’armement nucléaire à des éléments djihadistes. Il aurait pu y avoir une escalade vers une guerre nucléaire. Et en réalité il ne s’en est pas fallu de beaucoup. Pendant que les SEALs étaient encore dans le complexe de ben Laden, le chef d’état-major pakistanais, le Général Kayani, était informé de l’invasion et avait ordonné à son état-major en ses termes de "confronter tout aéronef non-identifié". Il présumait qu’il venait probablement d’Inde. Pendant ce temps-là à Kaboul, le Général David Petraeus, le chef de CENTCOM, a ordonné aux "avions de guerre US de répliquer si les Pakistanais prenaient l’envol avec leur aviation militaire". Nous en étions aussi proches. Revenant à Obama, "par chance" cela n’est pas arrivé. Mais le risque a été confronté sans inquiétude particulière, sans même en mentionner l’occurrence.

    Il y a beaucoup plus à dire de l’opération et de son coût immense pour le Pakistan, mais regardons plutôt de plus près l’attention portée à la sécurité en général. En commençant avec la sécurité face au terrorisme, et en nous tournant ensuite vers la question beaucoup plus importante de la sécurité face à la destruction instantanée par des armes nucléaires.

    Comme je l’ai déjà mentionné, Obama conduit actuellement la plus grande campagne anti-terroriste internationale du monde – les drones et la campagne des forces spéciales. C’est aussi une campagne génératrice de terreur. Le point de vue commun au plus haut niveau [est] que ces actes génèrent des terroristes potentiels. Je citerai le Général Stanley McChrystal, le prédécesseur de Petraeus. Il dit que "pour chaque personne innocente que vous tuez", et il y en a beaucoup, "vous créez dix nouveaux ennemis".

    Prenez les attaques à la bombe du marathon de Boston il y a quelques mois, à propos desquelles vous avez tous lu. Vous n’avez probablement pas lu au sujet du fait que deux jours après l’attaque du marathon il y a eu un bombardement par drone interposé au Yémen. D’habitude nous n’entendons pas beaucoup parler des bombardements par drones. Ils sont exécutés – juste des opérations terroristes de base qui n’intéressent pas les médias parce que nous ne sommes pas intéressés par le terrorisme international tant que les victimes, c’est quelqu’un d’autre. Mais nous avons entendu parler de celle-là, par accident. Il y avait un jeune homme venant du village qui a été attaqué qui est allé aux USA et il se trouve qu’il a témoigné devant le Congrès. Il a témoigné là-dessus. Il a dit que pendant des années, les éléments djihadistes au Yémen avaient essayé de les tourner contre les États-Uniens, de les faire haïr les États-Uniens. Mais les villageois ont refusé parce que la seule chose qu’ils savaient des États-Unis était ce qu’il leur disait lui-même. Et il aimait les États-Unis. Donc il leur disait que c’est un endroit formidable. Et donc les efforts djihadistes ont échoué. Ensuite il a dit qu’une attaque de drones a transformé le village entier en des gens qui détestent les USA et qui veulent les détruire. Ils ont tué un homme que tout le monde connaissait et qu’ils auraient facilement pu appréhender s’ils l’avaient voulu. Mais dans nos campagnes internationales contre le terrorisme nous ne nous inquiétons pas de cela et nous ne nous inquiétons pas de la sécurité.

    L’un des exemples frappants a été l’invasion de l’Irak. Les agences de renseignements états-unienne et britannique ont informé leurs gouvernements que l’invasion de l’Irak allait probablement mener à une augmentation du terrorisme. Ils s’en fichaient. Et en fait, c’est ce qui s’est passé. Le terrorisme a été multiplié par sept dans l’année qui a suivi l’invasion de l’Irak, selon les statistiques gouvernementales. En ce moment le gouvernement prend la défense de l’opération massive de surveillance. Voilà qui fait les gros titres. La défense repose sur l’argument que nous devons le faire pour appréhender les terroristes.

    S’il y avait une presse libre – une authentique presse libre – les unes des journaux ridiculiseraient cette affirmation sur la base que la politique est conçue de telle façon qu’elle amplifie le risque terroriste. Mais vous ne pouvez pas trouver cela, ce qui est l’une des innombrables indications de combien nous sommes loin d’avoir quoi que ce soit qui ressemble à une presse libre.

    Tournons-nous vers le problème plus important: la destruction instantanée par des armes nucléaires. Ceci n’a jamais été une grande préoccupation pour les autorités étatiques. Il y a beaucoup d’exemples saisissants. En fait, nous en savons beaucoup parce que les USA sont une société inhabituellement libre et ouverte et il y a beaucoup de documents internes qui sont déclassifiés. Nous pouvons donc savoir ce qu’il en est si nous le voulons.

    Retournons en 1950. En 1950, la sécurité états-unienne était simplement impressionnante. Il n’y avait jamais eu quelque chose de comparable dans l’histoire humaine. Il y avait un danger potentiel: les ICBMs (missiles balistiques inter-continentaux, ndt) armés de têtes thermonucléaires. Ils n’existaient pas, mais ils allaient exister un jour ou l’autre. Les Russes savaient qu’ils étaient largement en retard en technologie militaire. Ils ont proposé aux USA un traité pour interdire le développement des ICBMs armés de têtes thermonucléaires. Cela aurait été une excellente contribution à la sécurité états-unienne. Il y a une histoire de la politique des armements nucléaires majeure qui a été écrite par McGeorge Bundy, Conseiller à la Sécurité Nationale pour Kennedy et Johnson. Dans son ouvrage il a quelques phrases un peu désinvoltes à ce sujet. Il a dit qu’il n’avait pas pu trouver ne serait-ce qu’un seul mémo interne parlant de la question. Voici une opportunité de sauver le pays du désastre total et il n’y avait même pas de mémo interne qui en parlait. Personne ne s’en souciait. Oublions cela, passons aux choses importantes.

    Deux ans plus tard, en 1952, Staline fit une offre publique, qui était assez remarquable, pour permettre la réunification de l’Allemagne avec des élections libres supervisées au niveau international, dans laquelle les communistes perdraient certainement, à une condition – que l’Allemagne soit démilitarisée. C’est là un sujet très important pour les Russes. L’Allemagne à elle toute seule les avait plusieurs fois presque détruits au cours du siècle. L’Allemagne militarisée et faisant partie d’une alliance occidentale hostile est une menace majeure. Telle était l’offre.

    L’offre était publique. Elle aurait bien sûr mené à la fin de la raison officielle pour l’existence de l’OTAN. Elle fut rejetée avec dérision. Cela ne pouvait pas être vrai. Il y a eu quelques personnes qui l’ont prise au sérieux – James Warburg, un commentateur international respecté, mais il fut simplement dénigré et ridiculisé. Aujourd’hui, les intellectuels y regardent à nouveau, surtout avec les archives russes qui se libèrent. Et ils découvrent qu’en fait, apparemment c’était sérieux. Mais personne ne pouvait y porter suffisamment d’attention parce que cela ne s’accordait pas avec les impératifs politiques – la production massive de menace de guerre.

    Avançons de quelques années à la fin des années ’50, quand Krouchtchev a pris le pouvoir. Il s’est rendu compte que la Russie était loin derrière économiquement parlant, et qu’elle ne pouvait pas rivaliser avec les USA en technologie militaire en espérant poursuivre un développement économique, qu’il espérait accomplir. Il proposa donc une réduction mutuelle des armements offensifs. L’administration Eisenhower la rejeta plus ou moins. L’administration Kennedy écouta. Ils prirent l’éventualité en considération puis la rejetèrent. Krouchtchev en vint à introduire une réduction drastique et unilatérale des armements offensifs. L’administration Kennedy en prit note et décida d’augmenter la capacité militaire offensive – pas seulement la rejeter, l’augmenter. Elle était déjà loin devant.

    C’est l’une des raisons pour lesquelles Krouchtchev implanta des missiles à Cuba en 1962 pour essayer de rétablir quelque peu l’équilibre. Ceci mena à ce que l’historien Arthur Schlesinger – le conseiller de Kennedy – appela "le moment le plus dangereux de l’histoire" – la crise des missiles de Cuba. Du terrorisme de masse. C’est le genre de terrorisme dont l’Occident n’a cure parce que quelqu’un d’autre est la victime. Ce n’est donc pas rapporté, mais c’était à grande échelle. De plus, l’opération de terreur – qui s’appelait Operation Mongoose – avait un plan. Elle devait culminer avec une invasion en octobre 1962. Les Russes et les Cubains n’en ont peut-être pas connu tous les détails, mais il est probable qu’ils savaient au moins cela. C’était une autre raison pour l’implantation de missiles défensifs à Cuba.

    Suivirent alors les semaines très tendues que vous connaissez. Elles connurent leur apogée le 26 octobre. Ce jour-là, des B-52 armés d’armes nucléaires étaient prêtes à attaquer Moscou. Les instructions militaires permettaient aux équipages de déclencher la guerre nucléaire sans contrôle central. C’était le commandement décentralisé. Kennedy lui-même penchait vers l’action militaire pour éliminer les missiles de Cuba. Sa propre estimation subjective de la probabilité de guerre nucléaire se tenait entre une sur trois et une sur deux. Cela aurait essentiellement dévasté tout l’hémisphère nord, selon le Président Eisenhower.

    À ce moment-là, le 26 octobre, la lettre parvint de Krouchtchev à Kennedy offrant une issue à la crise. Comment? Par le retrait des missiles russes de Cuba en échange du retrait des missiles US de Turquie. Kennedy, en réalité, ne savait même pas qu’il y avait des missiles en Turquie. Mais il en fut informé par ses conseillers. L’une des raisons pour lesquelles il ne savait pas est qu’ils étaient obsolètes et en cours de retrait de toute façon. Ils se faisaient remplacer par des sous-marins Polaris invulnérables et beaucoup plus dangereux. Donc voici quelle était l’offre: les Russes retirent leurs missiles de Cuba; les USA retirent publiquement leurs missiles obsolètes qu’ils retiraient déjà de Turquie, qui bien sûr étaient une menace beaucoup plus grande envers la Russie que ne l’étaient les missiles à Cuba.

    Kennedy a refusé. C’est probablement la décision la plus horrible de l’histoire humaine, à mon avis. Il prenait un risque énorme de détruire le monde afin d’établir un principe: ce principe est que nous avons le droit de menacer qui nous voulons de destruction comme nous le voulons, mais que c’est un droit unilatéral. Et personne ne peut nous menacer, même essayer d’empêcher une invasion prévue. Pire encore est la leçon qui en est restée – que Kennedy est loué pour son courage calme sous la pression. C’est la version consensuelle aujourd’hui.

    Les menaces se sont poursuivies. Dix ans plus tard, Henry Kissinger a sonné une alerte nucléaire. 1973. L’objectif était d’avertir les Russes de ne pas intervenir dans le conflit israélo-arabe. Ce qui s’est passé est que la Russie et les USA s’étaient mis d’accord pour instaurer un cessez-le-feu. Mais Kissinger avait informé Israël en privé qu’ils n’étaient pas obligés d’y faire attention; ils pouvaient continuer. Kissinger ne voulait pas que les Russes interfèrent, donc il a sonné l’alerte nucléaire.

    Avançant de dix ans, Ronald Reagan est au pouvoir. Son administration décida de sonder les défenses russes en simulant des attaques aériennes et navales – des attaques aériennes à l’intérieur de la Russie et des attaques navales à ses frontières. Naturellement ceci alarma considérablement la Russie, qui à l’instar des USA était assez vulnérable et avait plusieurs fois été envahie et quasiment annihilée. Cela mena à la grande crainte de guerre de 1983. Nous avons des archives récemment déclassifiées qui nous disent combien c’était un instant dangereux – bien plus dangereux que ce que les historiens avaient imaginé. Il y a une étude actuelle de la CIA qui vient de sortir. Elle est intitulée "La Crainte de Guerre Était pour de Vrai". C’était presque la guerre nucléaire. Elle conclut que les services de renseignements US avaient sous-estimé la menace d’une frappe pré-emptive nucléaire russe, de crainte que les USA ne soient en train de les attaquer. Le plus récent numéro duJournal of Strategic Studies (Journal des Études Stratégiques, ndt) – l’une des publications les plus réputées – écrit que cet épisode est presque devenu le prélude à une frappe nucléaire pré-emptive. Et cela continue. Je ne vais pas passer par les détails, mais l’assassinat de ben Laden en est un exemple récent.

    Il y a maintenant trois nouvelles menaces (...)

    Lire la suite:

    http://www.politique-actu.com/actualite/peuple-ranimant-democratie-noam-chomsky-suite/831299/

     
  • Quand le Prince se fait Etat

    "La cité étant au service des personnes, le pouvoir doit reposer sur leur confiance et s’efforcer de la maintenir par un contact permanent avec l’opinion. Sans doute cette opinion peut-elle, doit-elle être guidée, mais elle ne doit être ni violentée, ni dupée, et c’est faisant appel à sa raison que le chef doit déterminer en elle la conviction. Ainsi doit-il avant tout distinguer les aspirations profondes et permanentes de son peuple, exprimer en clair ce que celui-ci dénie parfois bien confusément et le révéler pour ainsi dire à lui-même. Un tel débat ne peut être mené à bien que dans la sécurité. L’Etat au service des personnes ne doit ni les contraindre ni se servir d’elles comme d’instruments aveugles pour des fins qu’elles ignorent. Leurs droits doivent être garantis par un ordre juridique stable. La tribu qu’une passion collective soude à son chef est ici remplacée par la cité que gouvernent les lois."
    Marc BLOCH


     
    C'est précisément ce que préconisait Machiavel -qui avait parfaitement compris tout

    cela, et qui n'est pas celui que beaucoup ont incompris-, le Prince, c'est l'Etat.

    Lien permanent Catégories : Brèves
  • Quand même Monsieur Valls !

    Monsieur Valls est dans la série hypocrite, le nouvel homme fort du pays, il dénonce tout ce qu'ont fait l'UMPS depuis trente ans :

    - disparition de l'Etat dans tous ses pans de souveraineté

    - destruction de l'instruction en ayant imposé le modèle "éducatif "américain sur le fond avant qu'il ne s'installe logiquement dans la forme, oubliant que Jacques Delors et les Roundtables of industrialists fonctionnent ensemble

    - faisant mine d'ignorer que leur économie, qui tue notre industrie et nos services publics, leur est dictée par les Instituts de l'Entreprise

    Monsieur le Ministre, vous stigmatisez Alain Soral et ses coreligionnaires, mais vous travaillez aux ordres de ceux qui tiennent les petites marionnettes Soral et autres Dieudonné dans leurs mains !

    [En tant que Ministre de l'intérieur, monsieur Valls ne peut tout de même pas ignorer qu'Alain Soral
     est le pendant en France de la branche libertarienne qui se focalise sur les juifs et qu'il est référencé par cette garde avancée du système libéral, pour soutenir ce courant en France dans le but de déstabiliser l'Etat comme bien d'autres structures.

     
    http://chelm.freeyellow.com/libertarianproblem.html

    ]

  • New Public Management

    Medef.jpgCopé au mieux de sa forme libérale ! On dirait quand le Front National repompe le programme du Club de l'Horloge, à ses heures ...


    Club à l'heure de l'idéologie anglo américaine qui travaille à l'Union des droates, à la

    base.


    "Pour libérer l'Éducation nationale, on pourrait inscrire dans une ordonnance

    l'autonomie des chefs d'établissement, l'examen d'entrée en sixième, le

    développement massif de l'apprentissage. Pour libérer le marché du travail, les

    ordonnances permettraient de dire que le temps de travail est désormais fixé

    entreprise par entreprise, branche par branche, comme c'est le cas dans la quasi-

    totalité des pays occidentaux. Pour libérer les Français d'une fiscalité oppressante, je

    propose que l'on réduise de 10% la dépense publique. Soit 130 milliards de

    dépenses en moins. La moitié de ces économies serait consacrée à rembourser la

    dette, et l'autre moitié à rendre du pouvoir d'achat aux ménages et de l'oxygène aux

    entreprises. Je propose par exemple une baisse immédiate de 10% des charges

    sociales pour redonner tout de suite 40 milliards d'euros aux entreprises, financés

    pour moitié par la TVA et l'autre moitié par des économies dans les dépenses. Pour

    libérer les Français de l'hyper-réglementation, chaque nouvelle norme devra

    s'accompagner de la suppression d'une ou deux normes existantes. Il ne faut pas

    craindre de s'atteler à la réécriture des codes, de l'urbanisme, du travail... Je veux

    développer la contractualisation, notamment pour le top management de la fonction

    publique. Et évidemment la fusion des départements et des régions. Enfin pour

    libérer les générations à venir du fardeau de la dette, il faudra réformer notre

    modèle social." François Copé, 22/08/13.



     
    Il faut connaître du New Public Management, cette nouvelle notion de "service

    public" qui fait du citoyen un consommateur de services, et des services, des

    objectifs comptables.

    L'UE nous impose cette nouvelle norme qui détruit les services publics à la française

    qui ne sont pas reconnus par le droit européen.

    A noter que la Russie ne connaît que de ce Management à l'anglo saxonne qu'elle a

    emboîté sans problème à courir après les USA, on se demande si elle passera un

    jour par la case Russie, en un pays qui, de table rase en table rase, n'a aucun

    problème à devenir libéral.

    http://fr.wikipedia.org/wiki/Nouvelle_gestion_publique

     
    "
    La participation de l'Etat ne peut être considérée comme la construction d'un

    «État-providence», mais vient plutôt proche d'une état entrepreneuriale à la tête de

    fiducies sectorielles vise à être compétitif sur les marchés mondiaux. Tel qu'il

    apparaîtaujourd'hui, la restructuration de l'enseignement supérieur l'éducation est la

    clé pour comprendre comment la formation de cette entreprise état est conçu et

    quelles incertitudes structurelles pourraient apparaître.


    Après une période de faible pouvoir central dans les années 1990, la Russie

    Fédération cherche maintenant à rétablir son autorité et, en particulier, à reprendre

    pied dans la sphère publique "perdue". A travers les différents projets adoptées

    depuis 2004 pour réformer l'Etat, les services publics et stratégique industries, l'État

    n'est pas seulement perçu comme un régulateur et de contrôleur, mais aussi comme

    un acteur clé dans les secteurs qu'elle est censée reconstruire. Il fait usage de son

    légitimité de concentrer ses efforts sur les producteurs les mieux placés en national

    et la concurrence internationale; à se jeter de ceux qui ne sont pas rentables; et de

    sous-traiter ce qu'il veut faire plus flexible. Cela implique Les stratégies de

    transposition des grandes multinationales laquelle «New Public «Outils de gestion

    (NPM) sont déployées pour permettre à l'Etat d'agir comme un entrepreneur sur les

    marchés mondiaux. Ces outils, qui sont principalement associé à un tournant néo-

    libéral dans la gestion publique et ont été forgés dans Pays-anglo-saxons contexte

    institutionnel qui est très différent de Russie-sont présentes réapproprié par les

    acteurs locaux à partir d'un interventionniste perspective. L'enseignement supérieur

    constitue un défi économique majeur aujourd'hui et est un zone particulièrement

    privilégié en Russie car il conserve les avantages comparatifs hérité de l'époque

    soviétique. Les réformateurs de l'État fédéral face à la difficulté de le rendre

    compétitif à l'échelle mondiale sans perdre le contrôle de elle. À cette fin, l'ensemble

    du secteur et le système administratif chargé de sa gestion sont reconfigurés en

    fonction d'un certain nombre de NPM principes." 


     
    Rappel :


     
    Les politiques éducatives sont aujourd’hui bien ancrées dans le mondialisme, entièrement élaborées et conduites par les instances économiques et financières internationales, nous les retrouvons dans toutes les réformes gouvernementales sans que souvent, tant personnels politiques que pédagogiques n’y comprennent quoi que ce soit.


    Au sujet du statut du directeur d’école :

    Ce statut serait un danger pour l’école républicaine, enfin, ce qu’il en reste dans les structures, les méthodes républicaines d’apprentissage, poursuivent, elles, leur tranquille disparition pour laisser place aux méthodes mondialistes.

    Une fois de plus, il faut l’analyser à l’aune de l’idéologie mondialiste.

    Ce sont les dirigeants de l’ERT (European Round Table), petite soeur de la Business Round Table américaine, affiliés au groupe Bilderberg, qui pilotent les politiques mondialistes avec l’Ocde, on retrouve leurs desiderata directement dans toutes les directives de l’UE en matière éducative.

    http://dessousdebruxelles.ellynn.fr/spip.php?article36

    http://www.oecd.org/dataoecd/63/53/39487500.pdf

    http://www.institutmontaigne.org/desideespourdemain/index

    Ils instillent les idées d’autonomie des établissements scolaires, en se servant toujours d’idiots-utiles, car ce sont des prémices nécessaires à l’instauration progressive, selon la théorie de l’ajustement de l’Ocde, de la libéralisation à venir du marché éducatif.

    La personnalité juridique implique le statut d’Etablissement Public Administratif de l’école.

    Or les critères du passage de l’EPA à l’EPIC sont déjà réunis pour les établissements qui ne seraient plus destinés à rester publics, l’école publique ne concernera qu’un reliquat poubelle destiné aux indigents, servant de garderie ou d’antichambre à la prison.

    L’Etablissement public industriel et commercial est régi en majorité par le droit privé, il faut trois critères pour passer de l’EPA à l’EPIC, ils seront vite atteints puisque l’Education tout au long de la vie (Lifelong Learning, autre concept mondialiste élaboré par le monde économique) les prévoit :

    - l’école devient au sein de l’Education tout au long de la vie, un produit culturel comme un autre, avec services à la carte

    - il faut qu’une partie des ressources soit d’origine privée, ce qui se fait progressivement pour de nombreux projets sous-traités (voyages dits pédagogiques, journées découverte, projets intra muros du type la Main à la pâte, Défi lecture, Big Challenge, etc.), logiciels éducatifs actuellement fournis gracieusement par des entreprises privées (School.net, Beneyluschool, et autres sociétés qui se positionnent d’ores et déjà).

    - enfin, le critère de rendement évalué par les Livrets de compétences de l’Ocde, commandés et au service des magnats de l’European Round Table

    Cette réalité du passage d’EPA à EPIC est ajourd’hui celle du CNED.

    Quant au passage de l’EPIC en Sociétés Anonymes, voire complètes privatisations quand les capitaux sont majoritairement privés, nous connaissons :

    France Télécom, d’Electricité de France, de Gaz de France, d’Aéroports de Paris.

    Un nouveau statut signifierait également un nouveau concours, même pas sûre que les directeurs actuels l’obtiendraient, aujourd’hui, le métier est prisé par des surdiplômés qui ont du mal à gagner leur vie dans le privé, ils ont l’habitude de travailler beaucoup et le bilan coût-avantage est vite fait, surtout pour une femme. J’y vois d’ailleurs la raison du glisssement de cette profession de la gauche vers la droite.

    L’EN emploie d’ailleurs directement des enseignants qui n’en sont pas et qui viennent du monde de l’entreprise.

    On a vu ainsi la nomination à la direction d’une université d’un grand patron de l’European Round Table pour laquelle la transformation est toute stratégique.

    Ce qui est appelé pudiquement le « partenariat public-privé » par les mondialistes, est un piège qui mènera directement à la privatisation au service du monde marchand.

    Et si l’on fait miroiter un statut dont on bout du compte, il est essentiellement question de revalorisation salariale, elle sera conditionnée à l’adéquation aux résultats attendus par l’aune entrepreneuriale bien comprise dans les compétences DESECO de l’Union Européenne.

    La « nécessité » d’un statut de directeur d’école ne se fait que parce les politiques mondialistes concomitantes le demandent, le maître n’est plus maître dans sa classe, il doit s’inscrire dans une pédagogie de groupe, construire des projets dont il ne sera pas plus maître, s’aligner sur des plans de formation, etc., qui s’articuleront autour de l’idée d’adéquation aux objectifs de « régions apprenantes » (concept mondialiste qui casse toute idée de diplômes nationaux, l’éducation n’est vue que comme outil pour mettre à disposition une main-d’oeuvre opérationnelle, flexible, mobile à l’échelle planétaire en fonction des besoins du marché, l’apprendre à apprendre de l’éducation et la formation tout au long de la vie est fait pour cela), le système est bien bouclé, le monde marchand l’a noyauté bien plus dangereusement que les idiots-utiles du ministère.

    Au sujet de l’évaluation des élèves en maternelle :

    Il est vrai que les enfants portent toute leur vie les carences essentiellement éducatives que leurs parents leur ont données en héritage.

    En maternelle, ceux qui ne suivent pas sauf pathologies très rares, sont ceux dont les parents n’ont pas pris gare à leur éducation.

    Mais il faut bien comprendre ce dont il s’agit, et voir que la maternelle a cessé d’être la préparation à l’entrée dans l’écriture et la lecture pour ne s’attarder que sur des procédés superficiels et illusoires du vivre-ensemble, entre méthodes globales et nombrilisme.

    En l’occurrence, la mesure annoncée relève du Livret de compétences et autre rapport Pisa, Pirls (c’est-à-dire des instances mondialistes) qui entendent très clairement établir une traçabilité de la viande humaine et ne l’évalueront qu’à l’aune de leurs propres prescriptions. Ce sont des politiques demandées par le monde économique et qui seront appliquées dans tous les pays de l’Ocde et même au-delà.

    Et puis, il faut bien que les industriels adaptent les prochains logiciels ludopédagogiques destinés à « enseigner » à nos enfants, et que le marché éducatif à la carte prennent ses marques.

    Or leur façon de jauger est idéologique, tant sur le fond que dans la forme, elle est superficielle, la méthode de type Assimil est utilisée à tous les niveaux, y compris dans le relevé de compétences.

    Il est intéressant de lire dans les derniers rapports de l’Ocde qu’ils ont dorénavant définitivement renoncé à leur précédente idéologie égalitariste(ils ont bien défini que le but n’était plus d’obtenir toute une classe au Bac, diplôme national destiné à disparaître), leurs experts ayant conclu que l’économie du XXI ème siècle a besoin de peu de diplômés et pour rentabiliser l’affaire, de peu d’enseignants (à remplacer par des encadrants).

    Autonomie et flexibilité sont les deux nouvelles mamelles de l’enseignement.

    Chacun recevra un socle commun minimaliste, le darwinisme social se chargeant de faire le tri pour extirper une petite élite tout aussi stupide mais adaptée au système.

    Enfin, peut-être un jour, même l’économie comprendra-t-elle qu’elle est perdante à ce petit jeu.

    Autrement, il va s’agir pour nous, de vite changer nos logiciels concernant la façon de juger les politiques éducatives, si nous nous refusons à connaître le Nouvel ordre éducatif mondial, nous tomberons dans tous ses pièges.

    Un exemple de ces pièges techniques :

    Le « Compte formation universel régional » est un concept issu de l’Education tout au long de la vie.

    C’est une première étape dans l’idée de la Banque mondiale de doter chaque citoyen du monde d’un crédit-assurance formation que nous recevrons dès la naissance et qu’il s’agira de rembourser tout au long de la vie. Cela regroupera le financement tant de la crèche que les études, le chômage, le revenu minimal le cas échéant, la retraite, à lui de se fondre dans la flexibilité maximale, la nomadité planétaire, pour rembourser.

    [West, R 1998, Learning for life. Final report Review of Higher Education Financing and Policy. Canberra: AGPS :
    "Self-funded learning is the third characteristic of the lifelong learning literature. Le concept d'apprentissage auto-financé est lié à la caractéristique de l'apprentissage auto-motivé. The concept of self-funded learning is linked to the characteristic of self motivated learning. E..n reconnaissance des coûts impliqués dans le subventionnement de l'implication continue dans l'éducation et la formation, l'agenda politique de formation continue met l'accent sur la responsabilité des individus pour financer leur propre éducation et la formation continue avec un soutien minimal du gouvernement. In recognition of the costs involved in subsidising lifelong involvement in education and training, the lifelong learning policy agenda emphasises the responsibility of individuals to finance their own continuing education and training with minimal support from government. Le rapport définit un apprenant à vie comme une personne qui prend la responsabilité de son propre apprentissage et qui est prêt à investir temps, argent et effort dans l'éducation ou de formation sur une base continue. The West report defines a lifelong learner as a person who takes responsibility for their own learning and who is prepared to invest time, money and effort in education or training on a continuous basis." ]

     
    http://orianeborja.hautetfort.com/archive/2011/10/15/l-ecole-a-l-epreuve-des-pieges-mondialistes-dernieres-nouvel.html

  • Auto-entramponneur, l'entreprise qui va droit dans le mur

    Le statut qu'auto-entrepreneur, c'est une saloperie libérale qui permet de concentrer une énergie importante à court terme, c'est le système Tupperware appliquée à grande échelle de domaines.
    C'est une sorte d'emploi-avenir (qui-n'en-a-aucun), sans passer par la case Etat.
    Tu fabriques ton propre cerceuil avec la dernière énergie.

    E-pa-tant.



    Lien permanent Catégories : Brèves
  • Valls et l'immigration, des propos attendus

    Les propos de Valls sur l'immigration ne sont pas étonnants.

    Je l'avais étayé au moment des présidentielles, toutes les institutions mondialistes, patronat bien compris, sont passées au Plan B depuis longtemps.

    Si vous trouvez des libéraux comme des Laulan et des Gourévitch qui vous expliquent que l'immigration coûte chère, c'est que le bilan coût/avantage a été calculé.

    Non pas que l'immigration va s'arrêter, c'est simplement qu'elle va être rationalisée, pour être rentable au plus près.

    L'immigration choisie et bien choisie en fonction de l'intérêt du patronat.

    J'avais expliqué à l'époque comment le Mur américain avec le Mexique n'était pas fait pour qu'il n'y ait pas d'immigration, mais pour faire en sorte que ceux qui le passent soient aptes au service.

    Valls fait bien de lier leur séminaire à l'immigration et à l'école, en effet, le Nouvel Ordre éducatif mondial, planifié par le LifeLong Learning (Education Tout Au Long de la Vie), prévoit la mobilité, la flexibilité de la main-d'oeuvre en fonction des besoins.

    Et non pas en fonction du désir de chacun de se regrouper en famille, une famille qui est destinée à ne plus exister par ailleurs !

  • Égypte : quand le Wall Street Journal souhaitait l’émergence d’un Pinochet … remake de la stratégie de choc des Chicago Boys ? (Elisabeth Studer)

    pinochet-democraty-300x213.jpg"On ne pouvait trouver meilleur indice pour confirmer nos soupçons d’un lien éventuel entre la stratégie du choc menée par les USA au Chili via Pinochet et les événements actuels en Égypte.

    Comment ? via le Wall Street Journal lui-même. Lequel, en début juillet, affirmait ni plus ni moins qu’il fallait « un Pinochet en Egypte ».

    Manière en quelque sorte d’indiquer que les théories des Chicago Boys et de Mielton Frideman pourraient être appliquées à l’heure actuelle en Égypte, dans une stratégie du choc ? … laquelle permettant  une meilleure acceptation  de nouvelles règles économiques par les populations « choquées ».

    En vue – au final – d’ouvrir la voie à un libéralisme accru, et à la privatisation des richesses du sol et sous-sol – voire off-shore – du pays. Et ce, alors même que d’immenses réserves gazières viennent récemment d’être découvertes au large de ses côtes, ressources sur lesquelles Chypre et Israël semblent vouloir afficher leur suprématie, au grand dam, des pays environnants tels que Egypte, Liban, SyrieTurquie …

    En tout état de cause, rappelons que le 4 juillet dernier, le Wall Street Journal affichait en guise d’éditorial – non signé – que « «Les Egyptiens seraient chanceux si leurs nouveaux généraux s’avéraient être de la trempe d’Augusto Pinochet au Chili, qui arriva au pouvoir en plein chaos mais engagea des réformateurs libéraux et instigua une transition démocratique. Si le général Abdel Fattah al-Sisi essaie de restaurer l’ordre de Moubarak, il souffrira au bout du compte du même destin que Morsi.»

    Il est vrai qu’à la mort de Pinochet lui-même, en 2006, Forbes s’insurgeait contre la nécrologie du New York Times jugée trop sévère. Regrettant de devoir « vraiment chercher » dans l’article du New York Times « pour trouver un mot sur le fait que Pinochet a sauvé le Chili du chaos économique infligé par son prédécesseur socialiste, Salvador Allende.»

    Lequel éditorial rappelait que le général Pinochet avait pris le pouvoir le 11 septembre 1973 lors d’un coup d’Etat sanglant qui a renversé le gouvernement marxiste du président Salvador Allende. Précisant qu’il avait « ensuite mené le pays dans une ère de croissance économique ». Mentionnant tout de même au final que « sous sa présidence plus de 32.000 personnes ont été exécutés ou ont disparu et des milliers d’autres ont été détenues, torturées ou exilées.»

    Dans son ouvrage intitulé « La stratégie du choc. La montée d’un capitalisme du désastre », la journaliste canadienne Naomi Klein fournit quant à elle les éléments détaillés d’une enquête édifiante sur le dévoiement du capitalisme depuis plus de trente ans.  Naomi Klein remontant tout d’abord aux années 50, période durant lesquelles, un universitaire américain de Chicago, Milton Friedman avait mis au point une doctrine économique reposant sur un capitalisme sans entrave, que l’Etat, les services publics et même la volonté politique ne pourraient freiner.

    Cette doctrine ne pouvant néanmoins être mise en œuvre qu’à la « faveur » d’un « choc » émotionnel et brutal, volontaire ou non, frappant les peuples et offrant une voie royale pour l’émergence d’un libéralisme sauvage dans tous les sens du terme.

    Milton Friedman devra ainsi attendre  1973 pour voir  sa doctrine confrontée avec la réalité économique et politique d’un pays en voie de développement … le Chili.  Rappelons que le 11 septembre 1973,  le général Augusto Pinochet  arrivait au pouvoir dans le pays, à l’issue d’un coup d’Etat militaire. Renversant alors la sociale-démocratie du président élu démocratiquement, Salvador Allende.

    Si certes le gouvernement déchu dérangeait quelque peu les intérêts de Washington, le coup d’Etat aura offert l’opportunité à une équipe de jeunes économistes sud-américains formés à l’école de Milton Friedman de s’implanter au plus haut sommet du pays.  Lesquels, surnommés les « Chicago Boys » mettaient alors les bouchées double pour appliquer leur nouveau credo néolibéral basé sur la privatisation, la déréglementation et la réduction des dépenses sociales.

    Cette recette économique allait toutefois se trouver rapidement indigeste pour la population chilienne, entraînant des dégâts considérables pour l’économie du Chili : inflation des prix de presque 400%, flambée des prix des denrées alimentaires de base, privatisation des entreprises publiques au profit de multinationales …. souvent américaines, sans condition de réinvestissement dans le pays ni obligation d’embaucher de la main-d’oeuvre locale, explosion du chômage, délabrement des services comme la fourniture d’eau potable et d’électricité, mais également médecine et hôpitaux publics 

    Le principe de base ? Le chaos économique et social résultant de l’application de la doctrine des « Chicago Boys » n’aurait jamais pu se faire sans le soutien d’un régime dictatorial, ce dernier faisant usage de ses moyens militaires et policiers sa force pour soumettre les citoyens à la nouvelle politique. Les syndicats et les mouvements de gauche étant réprimés férocement, leur opposition au diktat des conseillers économiques d’un nouveau genre leur ayant été fatale.

    Milton Friedman nia quant à lui jusqu’au bout ses responsabilités dans la mise en place d’un Etat fasciste. Estimant parallèlement que Pinochet ne fut pas assez dur dans l’application de sa doctrine économique, ce dernier changeant de cap au final, le chaos économique menaçant son propre régime."

    Sources : WSJ, Reopen911, AgoraVox, Naomi Klein « La Stratégie du Choc »

    Elisabeth Studer – www.leblogfinance.com  – 17 aout 2013

  • Connaître des méthodes de l'ennemi

    manipulation.jpgOù l'on voit encore et comment le site de Washington Nouvelles de France et Le Cercle des Volontaires agissent de concert en instrumentalisant des faits pour déstabiliser les institutions françaises.
    La cible, c'est toujours l'Etat, l'Etat, toujours l'Etat.

    A l'instar de leur partenaire, l'Institut Pour La Justice (SIC), ils arrivent comme des charognards afin d'utiliser les situations et le désespoir des familles.
    En l'espèce, il s'agit d'histoires d'enfants placés dans les foyers d'Aide Sociale à l'Enfance où les cas sont toujours difficiles, délicats et l'objet de souffrance.

    Les libéraux vont évidemment récupérer le témoignage de parents désespérés -sans que jamais leurs dossiers ne soient connus et sans aucune confrontation avec la partie adverse- pour en faire l'objet d'une communication orientée et entièrement au service de leur idéologie.

    Dans le pseudo reportage, les parents-figurants ont été conditionnés au préalable, ils répètent tous le même discours, les mêmes chiffres, la même propagande.

    Toutes les filiales de ces tenants de la vision anglo américaine mènent ce genre d'agitprop.

    C'est ce que font également Robert Ménard, Alain Soral et d'autres, ramenant à leurs petites boutiques respectives, les colères des uns et des autres pour les monter à leur objectif final de chaos et de destruction de la France.

    Soral ne peut plus s'empêcher d'ailleurs de faire dans chacune de ses interventions, un brossage de poil en règle du "véritable" libéralisme, de cette "véritable" Amérique que l'on devrait aimer, de la "véritable" concurrence, omettant de dire que TOUTE concurrence mène au monopole, expurgeant la logique libérale de ses constantes.
    Ramenant sans cesse à ce libéralisme que nous n'aurions jamais exploré sur l'air bien connu du : le libéralisme ne fonctionne pas, il faut plus de libéralisme.

    Le tout est piloté depuis les Etats-Unis et par les think tanks alimentés par les multinationales.

    Lamentables, répugnants, à dénoncer, ces procédés sont de la manipulation pure et simple, émanant de personnes qui mentent sans vergogne, et qui prétendent vous parler la main sur le coeur.

    J'ose espérer que les personnes dupées ne sont pas si nombreuses qu'il y paraît, dans la population française, j'en suis certaine, le bon sens français a horreur de ces mascarades honteuses et déshonorantes, j'ai davantage peur pour le militant politique qui se range plus facilement au sifflet de gourous qu'il n'use de son propre cerveau, qui ne cesse de s'user à force de réciter la doxa sans jamais prendre le temps de l'étudier.


    Il faut toujours se souvenir que l'Etat est celui qui en France, détient nos attributs de souveraineté, tout ce qui peut encore rester d'Etat, c'est toujours un peu de liberté de notre peuple.
    Dès que vous vous en prenez à l'Etat, c'est une branche que vous sciez sous vos pieds d'homme libre.

    L'Etat est sans doute imparfait, mais il est notre histoire, l'Etat-Nation France est perfectible, mais nous devons veiller à l'inscrire toujours dans un continuum.

    Toute atteinte à l'Etat nous rapproche du "modèle" impérial américain qui ne laisse subsister que des communautarismes opposés les uns aux autres, des Etats sans attributs autre que folkloriques et accessoires, rien qui ne permettent de vraiment lutter contre l'hégémonie de l'oligarchie industrialo financière.

    Le seul contre-pouvoir, c'est l'unité étatique dont la France est la quintessence, notre vieux cadre national est le seul qui puisse ébranler le système.
    Prenez-en soin. 


    La CIA tente de faire croire que la réserve d'or américaine n'existe plus, et accessoirement que DSK se serait fait pincer pour l'avoir découvert.

    Je pense que la CIA veut discréditer ce qu'il reste d'Etat Américain.
    J'ignore comme tout le monde si cela est vrai ou pas (sur le sujet précis de l'or, et même si la crise de 2008 a accéléré la querelle libérale, et a sans doute été sciemment provoquée pour achever le processus de dérégulation dans tous les domaines), ce que l'on sait, c'est que le discrédit peut engendrer une perte de confiance et ainsi favoriser tel ou tel groupe privé qui ainsi, peut remporter des marchés.

    Il faut avoir à l'esprit que la CIA et les libertariens veulent détruire ce qui reste d'Etat.
    Pour eux, l'Etat, c'est l'assurance maladie d'Obama, les gros budgets militaires payés par les taxes des contribuables -taxe étant le mot qui met hors de lui le libertarien; l'impôt permettant à l'Etat de vivre- (budget militaire défendu par le Pentagone et contre lequel la CIA s'oppose), quand selon la pure logique libérale, la CIA -qui oeuvre pour l'instauration du système libéral mondial- voudrait libéraliser tous ces derniers secteurs. ]

  • L'école de la françaméricaine

    http://www.lemonde.fr/politique/article/2013/07/26/a-l-ecole-francaise-des-liberaux-conservateurs_3452554_823448.html

     

    Le Monde.fr | 26.07.2013 à 12h39 • Mis à jour le 29.07.2013 à 18h33 |Par Samuel Laurent

     

     

    A gauche, Alexandre Pesey, fondateur de l'IFP, à Washington avec des étudiants, dans le cadre de la bourse Tocqueville.

     

    "De la falsification du mariage à l'eugénisme" ; "Une imposture intellectuelle, le keynésianisme" ; "Apprendre à aimer la France"... Si vous êtes jeune, de préférence d'une sensibilité politique plutôt à droite, et prêt à régler une somme modique, voilà quelques-uns des cours auxquels vous pourrez assister dès septembre lors du prochain séminaire de l'Institut de formation politique (IFP).

    Avec un petit local administratif à Sèvres (Hauts-de-Seine), dans la proche banlieue parisienne, et un site Internet affichant l'objectif de l'école"former des jeunes pour redresser la France", cette petite structure n'est pas la plus connue des formations parisiennes. Pourtant, l'IFP, qui fêtera en 2014 ses dix ans d'existence, a formé plus de 600 jeunes à "rejeter l'interventionnisme économique et le relativisme moral" et à "servir [leur] pays".

    "Media training", cours de rhétorique, ateliers-débats, conférences... Parmi les centaines d'"auditeurs" qui ont suivi les week-ends de formation de cette petite structure – qui ne délivre pas de diplôme, on trouve quelques figures de la lutte anti-mariage gay, comme Samuel Lafont, ancien responsable national du syndicat étudiant de droite UNI, ou Vivien Hoch, jeune militant très actif dans les sphères radicales des anti-mariage gay comme le Printemps français. Il confirme : "Parmi les dirigeants de la Manif pour tous, certains sont sortis de l'IFP. Lorsqu'on a eu les premières interpellations, il y avait pas mal d'auditeurs de l'école, dans les 'paniers à salade [fourgons de la police]'!"

    "AMBIANCE LIBÉRALE-CONSERVATRICE"

     


     

    L'IFP ne s'en cache pas : elle se destine essentiellement à des jeunes qui se situent politiquement à droite. "Il n'y a pas de corps doctrinal"assure Alexandre Pesey, cofondateur et directeur de la structure. Mais il assume que l'IFP ait des valeurs comme "la primauté de la personne, l'attachement aux corps intermédiaires, aux racines, pas spécialement racines chrétiennes, mais l'ordre naturel des choses, la nature humaine".

    Il suffit de consulter les programmes des sessions de formation et leurs intervenants pour comprendre comment ces valeurs sont mises en avant. Deux aspects sont très travaillés : l'économie et les questions de société. Pour le premier, les personnes qui interviennent sont le plus souvent issues d'une sensibilité économique assez fortement libérale. Pour la session de septembre, les intervenants seront par exemple Nicolas Marques, économiste associé à l'institut Molinari, d'orientation résolument libérale, ou encore Agnès Verdier, duthink tank libéral Ifrap (Institut français pour la recherche sur les administrations publiques), proche des Contribuables associés

    Mais l'IFP fait aussi la part belle à des représentants de divers courants conservateurs. Le prochain séminaire de niveau 1 réunira ainsi Arnaud Gasset, invité régulier des "camps de la Rose blanche" (PDF) de la fondation "Liberté politique", engagée dans la lutte contre le mariage gay et dans la volonté depropager les idées de l'Eglise ; Jean-Marie Le Méné, président de la fondation Jérôme Lejeune, là encore d'inspiration chrétienne, et qui lutte contre l'IVG et l'euthanasie ; Alexandre del Valle, essayiste et géopolitologue, cofondateur du courant de La Droite libre, un courant situé très à droite au sein de l'UMP, et aux positions résolument pro-israéliennes et peu islamophiles ; Renaud Dozoul, assistant parlementaire du sénateur de Paris Pierre Charon et directeur de l'Observatoire de la christianophobie, ou encore Ludovine de la Rochère, présidente du collectif Manif pour tous et ancienne porte-parole de la fondation Lejeune. Des personnalités toutes classées à droite, et toutes situées dans ce qu'on appelle la "cathosphère", la défense des idées, valeurs et traditions chrétiennes.

    UNE ÉCOLE FONDÉE POUR DIFFUSER DES VALEURS LIBÉRALES

    Universitaire, auteur d'une thèse sur les mouvements conservateurs américains, et ancien journaliste à Washington, le directeur de l'IFP, Alexandre Pesey, est l'un des trois cofondateurs de l'école. Avec ses deux associés, Jean Martinez, avocat et initiateur du collectif Liberté j'écris ton nom, qui protestait contre les mouvements sociaux de 2003 ; et Thomas Millon, chef d'entreprise lyonnais et fondateur en 2002 de Duel, une association qui organisait des débats entre étudiants, ils se sont rencontrés à l'occasion d'actions menées par quelques jeunes étudiants de sensibilité libérale, un mouvement alors très peu représenté en France.

    Alexandre Pesey a passé une partie de ses études à Washington, où il a découvert les think tanks, structures encore inconnues en France à cette époque.Un vieux reportage du site Salon.com le cite, en 2003, lors d'une réunion de jeunes militants du Parti républicain. Surtout, lui et ses deux associés font partie d'une génération de jeunes diplômés qui s'enthousiasment pour les thèses "ultra-libérales" alors surtout en vogue aux Etats-Unis, mais peu développées en France."On a fait le constat qu'il n'y avait pas de lieu où se former et rencontrer en direct des intellectuels, experts, entrepreneurs, mais avec une ouverture à toutes les sensibilités", explique M. Pesey.

    C'est Bernard Zimmern, l'un des fondateurs de Contribuables associés, puissante association qui lutte contre la fiscalité, qui va aider les trois jeunes hommes àmonter leurs structure, une association, en leur ouvrant ses réseaux. "On a commencé à organiser une formation, puis trois, puis six, puis huit, ainsi de suite,s'amuse M. Pesey. Aujourd'hui, on en est à douze week-ends de formation par an." Si l'école insiste sur le fait qu'elle n'est affiliée à aucun parti, et si les statuts de l'association interdisent à un dirigeant d'exercer des responsabilités politiques, le public des formations est assez souvent un public militant, qui varie en fonction de l'actualité. Cette année, confirme M. Pesey, "le phénomène 'Manif pour tous' nous a amené un grand nombre d'étudiants, au point qu'on ne peut pas faireassez de séminaires". 

    Ceux-ci sont d'un coût modique : moins de cent euros pour un week-end de trois jours de formation. "Nous ne sommes pas chers", reconnaît M. Pesey, qui précise que les frais d'inscription ne financent que 20 % de l'activité de l'IFP, les 80 % restants étant assurés par des dons. "Ce ne sont ni des entreprises ni des fondations, mais des individus", assure-t-il, promettant qu'il n'y a "aucun gros mécène". Certains donateurs sont sollicités pour "parrainer" un étudiant. Quant aux intervenants, ils le sont en général à titre bénévole. 

    TRÈS À DROITE ?

     


     

    A l'UMP, on ne voit pas forcément d'un bon œil cette formation, qu'on juge "trop à droite", et plus proche des idées de l'UNI, le syndicat étudiant de droite, indépendant du parti tout en en restant proche. M. Pesey tempère : "On dit à nos étudiants 'engagez-vous, quelle que soit la forme d'engagement, allez-y', mais on ne leur donne aucune piste particulière. Cependant, lorsqu'on reçoit des intervenants, ils viennent échanger avec eux de façon assez informelle." Militant très engagé dans la Manif pour tous, Vivien Hoch, qui a suivi plusieurs week-ends de formation depuis trois ans, l'assure, "même si ce n'est pas revendiqué, l'ambiance est clairement libérale-conservatrice". 

    Les intervenants, eux, sont marqués à droite, voire très à droite. Proche des thèses libérales au départ, l'école a développé ses liens avec divers acteurs de partis ou de mouvements conservateurs sur le plan social. Fin 2012, Maxime Tandonnet, ancien conseiller immigration à l'Elysée, proche de Patrick Buisson, venait parler immigration. Jean-Yves Le Gallou, figure historique de l'extrême droite, est venu évoquer les médias, quand Yvan Blot, cofondateur avec M. Le Gallou du Club de l'horloge, l'un des creusets de l'extrême droite moderne, a échangé avec les auditeurs autour de la "démocratie directe", son dernier cheval de bataille. On peut encore citer Dominique Venner, autre "vieux sage" de l'extrême droite française, passé à la postérité en se suicidant par balle à l'intérieur de Notre-Dame-de-Paris, le 21 mai, qui était venu présenter un ouvrage en 2010."C'est un intervenant comme nous en avons trois cents", justifie M. Pesey.

    "L'accusation de radicalisme ne m'étonne pas, renchérit Vivien Hoch, "on est peut-être trop à droite pour certains, mais nous on se bouge." Pour le jeune militant, les valeurs qu'enseigne l'IFP la situent dans "les lignes de séparation actuelles au sein de l'UMP", entre tenants d'une droite plus modérée et partisans d'une "droite des valeurs", dans la ligne suivie par Patrick Buissonconseiller de Nicolas Sarkozypour la présidentielle. L'école, en tous cas, prépare ses étudiants à l'action politique. On y apprend à "faire un tract, un discours, écrire pour d'autres"... 

    LA "CATHOSPHÈRE" ET ICHTUS TRÈS REPRÉSENTÉS

    Plus récemment, l'IFP a fait la part belle à la "cathosphère". En mars, les étudiants ont ainsi pu entendre Philippe Darantière leur "décrypter l'extrême gauche". Ancien para, ce personnage de la sphère traditionnaliste catholique est considéré, ainsi que l'avaient révélé Le Monde et Mediapart, comme l'un des grands inspirateurs, avec Béatrice Bourges, des actions du "Printemps français". M. Darantière, à l'instar de Mme Bourges, gravite autour d'une fondation baptisée Ichtus, héritière du mouvement contre-révolutionnaire d'extrême droite de la "cité catholique".

    En 2012, en marge de la formation, l'IFP proposait d'ailleurs aux étudiants d'assister à une réunion du "réseau juristes d'Icthus", qui réunit les femmes et hommes de loi proches de la fondation et de ses idées. Et en mars, Bruno de Saint-Chamas, président d'Ichtus, venait évoquer des "morceaux choisis pouraimer la France".

    On trouve dans les formations de l'IFP une bonne partie du noyau dur de la Manif pour tous : Aude Mirkovic, juriste qui a fourni nombre d'argumentaires anti-mariage gay ; Pierre de Balincourt, consultant en communication et porte-parole, de la "life parade", une association anti-IVG dont la campagne était soutenue par la fondation Jérôme-Lejeune, Alliance Vita et d'autres acteurs des mouvements "pro-vie" qui étaient aussi mobilisés contre le mariage ; Béatrice Bourges, chef de file du Printemps français, était intervenue en 2010 au nom de son "collectif pour l'enfant" ; Elizabeth Montfort, elle aussi figure des catholiques traditionalistes et adversaire déclarée du "lobby du gender" évoquait la question fin 2012 devant les étudiants de l'IFP.

    Et ceux-ci sont nombreux à s'être engagés dans la lutte anti-mariage. Il suffit, surFacebook ou Twitter, de croiser les mots-clés IFP et "Manif pour tous" pour leconstater.

    DES INTERVENANTS PARFOIS "LIMITE"

    Tous les formateurs de l'IFP ne sont pas aussi engagés ni aussi radicaux. Des économistes, des politologues plus "neutres" viennent également, de même quedes journalistes, par exemple Eric Le Boucher, des Echos, Guillaume Perrault, duFigaro, ou Raphaël Stainville (ancien de l'hebdomadaire Valeurs Actuelles qui travaille désormais au Figaro magazine). Mais quelques thématiques sont abordées par le biais d'acteurs et de discours d'un genre particulier. C'est le cas des questions d'immigration et d'Islam.

    Outre Alexandre del Valle, auteur de textes violents contre l'Islam, on peut citer, sur les questions de sécurité, un membre de l'Institut pour la justice, organisation de victimes aux méthodes parfois douteuses, ou encore Anne-Marie Delcambre, islamologue et théoricienne de l'unicité entre islam et islamisme, et souvent citée par divers groupes d'extrême droite, ou Marie-Thérèse Urvoy, autre islamologue aux positions là encore très critiques sur l'islam, et régulièrement reprise par des groupes islamophobes comme Riposte laïque. "On va chercher des gens qui sortent des sentiers battus, qui présentent ce qu'on n'entend pas trop", explique M. Pesey.

    INSPIRATIONS AMÉRICAINES 

    "C'est une formation différente, un peu à l'américaine", se félicite Vivien Hoch, quand Alexandre Pesey reconnaît lui aussi que ce sont les think tanks américains qui l'ont amené à réfléchir à une formation "militante" comme l'IFP. Il a d'ailleurs monté, en parallèle, la "bourse Tocqueville", qui lui permet d'emmener quelques étudiants aux Etats-Unis.

    Le directeur l'assure : "Nous ne travaillons avec aucun institut [américain] en particulier." Les étudiants font un "circuit" dans plusieurs organisations, en général politiquement plus proches des républicains que des démocrates. "On a une cinquantaine de rencontres, avec les médias, les think tanks, c'est 'grand angle'", assure M. Pesey, qui précise que les think tanks en question ne financent pas ces voyages ni l'activité de l'IFP. 

    L'institut a pourtant bénéficié de quelques bourses et prix outre-Atlantique. Et l'épouse de M. Pesey a travaillé au sein du Leadership Institute, un think tank qui veut "identifier, entraîner, recruter des conservateurs dans la politique, le gouvernement et les médias", selon son fondateur, Morton C. Blackwell, conseillerdu président Reagan. Le leadership institute consacrait en 2012 une interview au directeur de l'IFP. La fondation Templeton, organisme fondamentaliste protestant et conservateur, qui finance des recherches créationnistes, a accordé un "Freedom Award" à l'IFP en 2008. On peut encore citer la Federalist Society, autre organisation conservatrice "libertarienne" (militant pour un Etat minimal), qui évoque dans son rapport annuel 2012 de "nouvelles relations" établies avec différents groupes, dont l'IFP.

    INFLUENCER LE DÉBAT

    Les parcours des anciens étudiants de l'IFP sont multiples et variés. "Certains vont dans l'entreprise, d'autres militent sur des sites, d'autres encore vonttravailler en politique, deviennent élus municipaux, collaborateurs d'élus, journalistes, associatifs, etc.", se félicite M. Pesey. "Ravi" du cursus, Vivien Hoch évoque aussi les mérites du "réseau de personnes sûres" constitué par les anciens de la formation. "On a ce réseau à disposition, y compris américain, on a les coordonnées de tous les anciens et des offres d'emploi dans des lettres mensuelles", explique-t-il.

    Récemment, l'école a créé un prix "Razel de la Toile", destiné à récompenser les étudiants qui agissent au moyen d'Internet. "Avec le Web, on peut être acteur tout seul ou à trois ou quatre", se félicite M. Pesey. Les sites récompensés de ce prix ont été le "pure player" libéral Contrepoints et le portail conservateur Nouvelles de France, qui comptent parmi leurs collaborateurs nombre d'anciens de l'IFP.

    Au final, que cherche à accomplir l'IFP ? Alexandre Pesey se défend de tout sectarisme. "On veut créer le débat en France, mais aussi à droite, où ce n'est pas toujours la tradition", explique le directeur. "Après, si les idées qu'on défend avancent, on ne sera pas plus mécontents." A l'heure où la "droitisation" divise l'UMP, et où l'on voit renaître un courant conservateur, notamment autour de questions des "valeurs", comme on a pu le voir lors des débats autour du mariage gay, les idées libérales et conservatrices de l'IFP semblent connaître un succès croissant. Ce dont se réjouit Vivien Hoch, pour qui l'école représente avant tout "un lieu où, enfin, la jeunesse de droite peut être libre et exister".
     

    Comment l'on retrouve toujours le patronat et l'atlantisme derrière La Manif Pour Tous :
    http://www.ndf.fr/poing-de-vue/20-03-2013/le-syndrome-de-boulanger#.UWKhaKuAuWc

    Catholique traditionaliste, présenté par son éditeur comme un militant « engagé dans le combat pro-vie et la défense de la famille », Darantière réclame, dans un livre écrit en 2005, une « action politique catholique » Selon sa fiche Linkedin, il travaille comme « expert en relations sociales et syndicales », après « trente années d’expérience en prévention des risques et des crises », en qualité de « directeur des études chez IST Social Entreprises », une « société de conseil, études et formation en relations sociales et sociétales ».

    L’Institut supérieur du travail est en réalité une structure liée au patronat de la métallurgie, bien connue pour avoir assuré la reconversion de nombreux militants d’extrême droite.

    Mais Darantière a surtout été commandant de compagnie de l’armée française et instructeur en opérations extérieures, en Afrique et dans l’océan Indien, ce qui lui vaut de solides amitiés dans les milieux mercenaires, et parmi l’équipe du célèbre Bob Denard, auteur de deux coups d’État aux Comores. Par la suite, il a rejoint l’équipe de Philippe Legorjus, l’ancien chef du GIGN passé au privé après l’affaire d’Ouvéa, comme « directeur des projets » chez PHL consultants (de 1991 à 1994), puis « directeur associé » d’Atlantic Intelligence (de 1995 à 2001).
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