Tous les artisans ne sont pas des escrocs mais ...
Mais il en est qui, s'ils en étaient, ne s'y prendraient pas autrement.
Ma fille ayant décidé d'apprendre le violon il y a cinq ans, je lui ai loué un violon d'occasion auprès de monsieur K., luthier à Nantes, sur les conseils de son professeur.
Contrat signé il y a donc cinq ans, nous avons un violon 3/4 pour débutant pour 51 euros par trimestre et donc quatre trimestres dans l'année.
A ce compte, le luthier nous facture tout de même 50 euros de cordes quand il faut les changer.
Ma fille ayant atteint ses treize ans, je décidai de lui offrir son premier violon, le luthier faisait état sur son site de violon d'occasion à partir de 250 euros.
Elle n'a que treize, un petit violon d'étude à ce prix, c'est déjà un très beau cadeau étant donné ce que je gagne.
Tentative de prise de RDV avec notre luthier, qui pour la circonstance, un mois avant Noel, n'a plus de violon à petit prix en réserve, il n'a que des violons à 1000-1400 euros (Ayant appris à connaître le personnage, c'est sans doute à la tête du client).
Je lui dis que cela serait ridicule, étant donné l'âge de ma fille et ma condition sociale, je lui dis que je ne peux pas mettre ce prix-là dans un violon, que j'attendrais qu'il ait de meilleures offres.
Ou bien que je repartirai pour une location, mais il me dit qu'il n'a plus de violon entier non plus en location.
Il aurait alors soudainement quelque chose à vendre dans les 400 euros.
Nous convenons de nous rappeler.
Entre temps, je regarde un peu les prix sur Internet, et je trouve un luthier ayant pignon sur rue, qui propose des violons d'étude pour 200 euros, certifiés fabriqués par ses soins.
Cela correspond à ce que je cherchais et je me décide donc pour ce choix, et n'ayant pas réussi à obtenir un rendez-vous avec mon luthier d'origine, me pointe tout à l'heure dans son atelier.
Je sonne, c'est un rez-de-chaussée cossu dans une belle bâtisse en pierre au parquet qui craque chaleureusement sous le pas.
Il m'ouvre et semble surpris.
"Vous n'aviez pas pris rendez-vous ?"
"Non, mais je sortais du travail et profitais de finir plus tôt pour ramener le violon et mettre fin au contrat, ma fille en a eu un pour Noel finalement."
" Ah mais il fallait me prévenir plus tôt, je ne peux pas arrêter la banque" me dit-il toujours sur le pas de la porte.
Ce n'est pas grave cela, je viens rendre le violon et mettre fin au contrat, l'intendance suivra.
Il ouvre le coffret alors que je certifie que ma fille en a pris grand soin, et c'est la vérité, ma fille est comme moi, elle conserve tout et très soigneusement, je lui ai donné tous mes jouets et même des vêtements de quand j'étais petite et plus jeune, elle pourra tout transmettre en excellent état elle-même.
Tout de suite et même s'il a l’œil du luthier, il pointe une petite plaquette blanche au bout de l'archet qui manquerait et serait consécutive d'un choc.
Diable, si ma fille avait un jour fait tomber son archet, elle serait venue désolée m'en faire part et je lui aurais dit que ce n'était pas grave et nous serions allées le faire réparer.
Et minutieuse comme elle est, elle aurait sûrement remarqué si cette petite pièce avait manqué.
Il me montre la petite pièce en question sur un autre archet et me dit que cela fera 75 euros.
Il me dit aussi qu'il va me facturer les cordes, qu'il faut changer systématiquement, 50 euros.
Plus le contrat qu'il ne peut arrêter en janvier, 51 euros de plus.
Je rappelle qu'il vendait le violon d'occasion que je louais 250 euros, et qu'il va donc, soit revendre, soit relouer celui que je lui ramène, et sûrement en l'état comme il me l'a loué il y a cinq ans, et que je lui ai ainsi au moins déjà payé quatre fois ...
Je signe un chèque et lui fais calmement part de mon ressenti.
Je souris gentiment et lui dit avoir le sentiment qu'il est un peu gonflé.
"Vous voyez, c'est dommage, je voulais un violon, mais vous donnez l'impression d'être très à cheval sur le bénéfice que vous pouvez faire qu'autre chose".
Jamais il ne m'a parlé de musique, de toucher du violon, de quoi que ce soit, tout ce qui l'intéresse, et dans des proportions aberrantes, c'est l'argent qu'il peut se faire rapidement sur le dos d'un client.
Il commence à me dire que c'est dur pour lui, me demande si je sais qu'il faut un mois pour faire un violon et me dit même que le violon que j'ai loué était industriel, qu'il était impossible de faire un violon à ce prix-là.
Que même l'archet, en excellent état mais qu'il me facturait quand même et sans doute dans l'état où il me l'avait laissé, était industriel et qu'il n'allait même pas le réparer, qu'il allait le jeter et le remplacer par un neuf à 60 euros.
Je suis scotchée.
Il avoue lui-même sous le coup de l'émotion combien il m'a roublée.
Je lui laisse, pour ses faux-frais, le chèque du montant du violon que j'avais offert à ma fille pour Noel, et le quitte en lui disant au revoir et aussi que pour son bien, il fallait peut-être qu'il remette en cause sa façon de faire avec les gens, qu'il aurait tout à y gagner et qu'en l'état, je ne regrettais plus un seul instant de ne pas avoir fait l'acquisition d'un nouvel instrument dans sa boutique.
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